Chroniques de la vie au XI et XIIe siècle

Voyages dans le temps

1070, Acharie

Dans toute cette généalogie de seigneurs de Marmande, le premier connu est Acharie de Marmande. Ses hauts faits sont relatés dans le cartulaire de l’abbaye de Noyers.

Extraits :

 1074 Charte 67

« Acharie de Marmande combattit contre le vicomte de Châtellerault, comte Aimery, maitre de Faye ( Faye la Vineuse), et contre Geoffroy Fuel, seigneur de l’Ile ( Ile Bouchard), et tous trois s’allièrent contre lui détruisirent son château et sa roche et lui enlevèrent toute sa terre.
Alors Acharie dépossédé de sa terre alla à Nouâtre et y resta plusieurs jours dans l’esprit de livrer bataille contre l’Ile, Faye et Chatellerault. Là, il trouva que Peloquin, fils de Borelis s’était emparé du château de l’Ile. Acharie alla le trouver et fit la paix avec lui. De là, il entreprit de combattre contre Châtellerault et contre Nouâtre. Une nuit qu’il s’était levé pour piller, il vint avec ses hommes sur la colline de Grizay
( commune de Pussigny) et là il trouva dans la maison d’un paysan des gens rassemblés. Il entreprit l’assaut de la maison et ceux là se réfugièrent dans le rocher. Ils incendièrent la maison au dessus d’eux et ils les firent tous mourir dans la roche. Là est morte la sœur de Gautier des monts Peux avec ses enfants, la mère de Bernard, frère d’Hubert des Peux et plusieurs autres femmes et enfants. Cette même nuit, Acharie fut capturé par son neveu et conduit à Nouâtre ou il resta quelque temps en captivité. Mais comprenant que ce qui lui arrivait était dù au grand péché qu’il avait commis, il supplia l ‘abbé Rainier et les moines de prier pour lui le Seigneur, leur libérant trois de leurs pécheurs qu’il tenait emprisonnés. Acharie ayant été libéré de ses chaines, fit appel à l’abbé Rainier et à ses moines afin d’obtenir la paix des parents de ceux qu’il avait tués, ce que l’abbé et les moines firent volontiers. Ils conduisirent ces gens sur l’Ile et les réconcilièrent avec Acharie, celui ci s’engageant par cet accord à faire chanter deux cent messes pour les morts…. »

Pour remercier les moines d’avoir été libéré du péché d’homicide, il donne à l’abbaye la moitié du port situé en face de l’église de Ports sur Vienne.

Cette tragédie a marqué les esprits. Tuer des paysans sans armes, des femmes et enfants piégés dans un souterrain refuge est condamné par le mouvement de la Paix de Dieu qui depuis le Concile de Charroux en 989 protège les paysans, les femmes et les enfants. Acharie en infraction aux principes de la Paix a cherché et obtenu un accord avec les familles de ses victimes.

Cela n’a pas calmé Acharie pour autant.
Quelques années plus tard, on le retrouve armes au poing.

1096 Charte 246

Avant de partir pour Jérusalem, Bouchard de Marmande donne le moulin qu’il possède.

« Pour la postérité de notre renom, nous avons pris soin d’enregistrer par écrit et en présence de témoins ce que Bouchard de Marmande avant son départ pour Jérusalem nous a donné pour le salut de son âme, à Dieu, à Ste Marie et à nous, moines qui demeurons ici, soit le moulin qu’il possède de son plein droit aux Trois Moulins. Son frère Geoffroy approuva cela.
Zacharie a lui aussi donné son accord pour le don de ce moulin. Si de quelque part que ce soit quelque contestation venait à s’élever et s’il ne pouvait la régler par juste jugement, il rendrait aux moines 1000 sous.»

1098 Charte 265

Extrait :

« Nous voulons que tous les fidèles de la Ste Eglise de Dieu sachent que l’abbé 2tienne de l’église de Noyers et les moines ont acquis la terre située près de Razines. Ce fut le jour même au moment où des soldats de Ste Maure et de Marmande engagèrent le combat. Dans ces circonstances, un adolescent, le jeune Bernard fils d’Amalvinus Queue de vache est mort. »

1102 Charte 310

Sur la bataille de Boson, vicomte de Châtellerault, de Barthélemy de l’Ile Bouchard et d’Hugues de Ste Maure contre le seigneur de la Faye

« Boson, vicomte de Châtellerault, Bartholomé de l’Ile et Hugues de Sainte Maure ( Sainte Maure de Touraine) ayant rassemblé leurs armées ont assiégé la roche de Marmande et pendant qu’ils poursuivaient leur siège, quelques soldats sont partis pour guerroyer contre le seigneur de la Faye, avec l’aide duquel le seigneur de Marmande combattait contre eux tous. Mais les soldats de la Faye ayant fait une sortie, ils poursuivirent leurs attaquants. Dans cette poursuite l’un des fuyards nommé Aymeri d’Avoir se retourna et heurta violemment un noble de la Faye, Raoul des Fourneaux et le tua… »

Le seigneur de la Faye et ses hommes profondément choqués vont trouver l’abbé afin d’obtenir réparation. L’abbaye reçoit pour le salut du défunt des terres et des paysans, et un moine de l’abbaye chargé de prier pour l’âme du défunt. Cette réparation est de beaucoup plus grande valeur que ce qu’Acharie a donné pour son crime à Grizay.

Cette fois, Acharie a fait alliance avec son ancien ennemi, le seigneur de la Faye. Par contre l’Ile Bouchard, Châtellerault restent ses ennemis fidèles avec un nouveau venu, Hugues de Sainte Maure. Son château et sa roche, ses souterrains, qui ont été détruits en 1074 sont suffisamment reconstruits en 1102 pour que ces 3 armées puissantes en fassent le siège après avoir été vaincus précédemment par Marmande et Faye.

La mort par accident d’un noble marque les esprits presque autant que celle des paysans du drame de Grizay…

Parmi toutes ces chartes, une autre témoigne de l’esprit de l’époque. Elle concerne le frère d’Acharie, Bouchard de Marmande. Il a fait la première croisade, celle des barons en 1096 et en est revenu. Dans ce texte, il sent sa mort venir. Il va faire un don pour le salut de son âme, mais sa générosité ne fait pas l’unanimité dans sa famille.

1110 Charte 375

« Les hommes, au seuil de la mort, saisis d’angoisse, se convertissent souvent et donnent leurs biens pour obtenir le pardon des mauvaises actions qu’ils ont commises.

Ainsi comme l’eau éteint le feu, ainsi l’aumône chasse le péché. L’aumône sauve un homme du châtiment, c’est pourquoi, nous les moines, nous notons par écrit tous les dons faits en notre faveur en prenant soin de transmettre à l’avenir tous ces écrits.

Bouchard de Marmande, un noble proche de nous, un de nos grands amis, mal placé un jour dans un combat fut gravement blessé et la blessure empirant, il fit venir à lui les moines de l’abbaye de Noyers, et debout, il leur dit à eux et aux autres présents :

«  Moi Bouchard, au nom de Dieu, je donne à Dieu et à l’abbaye Sainte Marie de Noyers et à ses moines tout ce que je possède sur l’alleu de Buxière, la chapelle, bien entendu, toute la terre que j’y possède, l’eau, la rive, la viguerie et tous mes droits pour mon âme et pour qu’ils me fassent moine et prient pour moi Dieu et la Sainte Mère de Dieu. »

Après qu’il eut fait ce don et qu’il fut fait moine, il mourut. Il fut enterré dans le cimetière de Noyers, sa tombe se trouve à côté de celle de sa sœur ainé Sophise comme il l’avait demandé.

Tout cela fut décidé librement, comme nous l’avons écrit avec comme témoins Geoffroy Rucival, Gérard préposé et Longuus de Noyers et Ingelger. Acharie le frère de Bouchard approuva tout cela et il ajouta plusieurs dons écrits ailleurs…
Les fils de Sophise, neveu d’Acharie approuvèrent aussi tout cela, Adelelme queue de vache, Urias, Salatiel, Symon. Témoins d’Acharie leur oncle : Hugues Bouchard et Aimeric d’Ecueil. Audierde surnommée Cana, la sœur d’Acharie, et épouse de Gaultier Timosus approuva aussi tout cela. Témoins Bilete, femme de Ganelon et Adeburge, mère d’Ogier.
Mais après, regrettant sa décision, elle critiqua tout cela avec son époux, les moines au sujet du don écrit de Bouchard, l’alleu de Buxière, évidemment, et sur d’autres biens concernant les moines. Les moines alors les prièrent plusieurs fois de donner leur accord pour toutes ces choses.

Alors, inspirés par Dieu, ils répondirent à leurs prières. Ils reconnurent avoir injustement critiqué et approuvèrent les paroles des moines, soit Gaultier Timosus, sa femme Audierdis Cana, leurs fils Geoffroy, Rainaud et fille Aduis, ils approuvèrent le don de Bouchard comme l’avait approuvé Acharie avec l’accord suivant. Ils seraient participants de tout le bénéfice de la dite église et ce qu’ils avaient entrepris de mal contre eux, les moines le leur pardonneraient à eux et à leurs gens. Les moines donnèrent alors de l’argent par charité.

Témoins Rainald de la Guerche, sa femme Pétronille.

Mais après cela, les deux fils de Gaultier, devenus adultes, Geoffroy et Rainaud critiquèrent eux aussi tout cela, les dons de Bouchard et d’Acharie leur oncle. Pour cette cause, de nobles hommes étant rassemblés tant par les moines que par eux mêmes, ils se rassemblèrent pour un plaid à La Guerche, et là, par ces hommes de grande sagesse, il fut jugé qu’ils avaient injustement intenté cette contestation aux moines ;mais eux n’acceptant pas ce jugement s’y opposèrent longtemps et avec vigueur. Et comme cela était très nécessaire, ceux qui étaient présents sollicitèrent l’abbé Etienne qui était là de leur donner argent en charité. L’abbé Etienne, accédant à leur sollicitation leur donna 100 sous de monnaie angevine. Lors ces deux frères en raison de cette charité et pour leurs âmes accordèrent tous les dons à l’abbaye de Noyers. »

L’alleu est une terre libre qui ne dépend d’aucun autre seigneur, donc sans impôts. C’est un bien précieux et convoité. Le cartulaire ne cesse de relater les dons, reprises et dons à nouveau de cette terre…

1111 Charte 377

Au sujet de Buxière et de Dangé

«  Il est connu de tous les fils de la Ste Eglise qu’Acharie de Marmande a donné la moitié de l’alleu de Buxière, tant en terre qu’en eau pour le salut de son frère Bouchard, ainsi qu’il en est écrit plus haut.
Mais plus tard, il donna à Dieu et à Ste Marie de Noyers l’autre moitié qu’il s’était gardé et il vint dans leur chapelle le jour de la Ste Marie de Mars, avec son fils Bouchard et il dit d’une voix forte :

« Moi, Acharie, je donne à Dieu et à Ste Marie de l’église de Noyers ce qui me restait dans l’alleu de Buxière, la rive, l’eau qui la traverse, l’ile et le port, la réserve et trois lopins de terre à Dangé et tout ce qui se trouve sur l’alleu, tant en terre qu’en eau. Je donnerai à Dieu, Ste Marie et aux moines serviteurs de son fils après ma mort, de très grands avantages, de sorte que si durant la vie je veux me faire moine, ils posséderont tout ce que j’ai énuméré.

Et j’affirme que je ne me ferai pas moine dans une autre église que Noyers. Et si je meurs en l’état séculier, j’ordonne que mon corps soit enterré dans ce monastère et dans aucun autre cimetière et les moines feront cela pour moi comme ils le font pour leurs moines et mon nom sera écrit dans le martyrologue et mon anniversaire sera célébré comme vous le faites d’habitude ; même si je meurs à trois jours de marche de Noyers ou plus loin encore, les moines me porteront jusqu’à Noyers, m’enterreront dans leur cimetierre et ils posséderont tout ce que j’ai hérité e mon père à Buxière sauf la terre du Coudray qui ne fait pas partie de l’alleu.

Je leur donne en plus pour le présent la terre située près de la Vienne pour construire une ferme où se reposeront les hommes et les ânes qui vont au moulin, et la terre devant la ferme le long de la rive avec des noyers puisqu’elle a été bornée en ma présence, et l’eau qui longe la rive… »

Tout cela est évidemment approuvé par les fils d’Acharie, Bouchard et Geoffroy.

Sentant sa mort venir, Acharie continue ses dons…

1111 Charte 378

« Il est connu de tous les chrétiens qu’Acharie de Marmande a donné à Dieu, à Ste Marie et à son monastère pour l’âme et la tombe de sa femme Elisabeth l’église de Nancré, c’est à dire la plus récente et toutes les offrandes de l’autel, les recettes de l’aumône, les tombes et le cimetière, la terre et le bourg proche de l’église, les serfs et tous les avantages sur les habitants et sur tout ceux que les moines voudront ajouter comme habitants.

Il sembla alors à Acharie que ce qu’il avait donné pour le salut de son épouse était insuffisant et il ajouta un don.

Il donna au monastère la moitié de l’écluse de Buxière qui lui restait.
Car il avait déjà donné l’autre partie pour l’âme de son frère Bouchard, pour celles de ses parents et la sienne propre. Il donna comme nous venons de le dire aux moines l’eau et les moulins et tous ses biens dans l’écluse et tout le cénage sur tous les pêcheurs qui viendraient habiter au domaine de Buxière. Quand cela fut écrit, Acharie donna pour sa femme comme pour lui même tous les autres bénéfices de ce lieu
. »

Tant de précisions de la part des moines pour noter les dons et bénéfices acquis, est ce que cela relève de la charité chrétienne ou d’une gestion très pragmatique de leurs intérêts ?

L’histoire de l’alleu de Buxière est loin d’être terminée…

1111 Charte 379

Acharie rend aux moines la moitié de l’écluse de Buxière

« Il est connu de tous qu’Acharie de Marmande a rendu à Dieu, Marie et aux moines la moitié de l’écluse que Bouchard son frère leur avait donné quand il leur avait donné la moitié de l’alleu de Buxière.
Acharie leur donna donc toute l’eau d’une rive à l’autre de telle sorte que les moines et Zacharie construisent une écluse en commun et en partagent la pêche en deux. Or les moines auront leur propre moulin et Acharie le sien propre. En échange de ce don, les moines fêteront l’anniversaire d’Acharie chaque année comme ils le font pour un moine profes. L’abbé Etienne lui donna en charité une cuirasse et pour son épouse qui a confirmé tout cela 10 sous….
Plus tard, Acharie leur abandonna la contestation qu’il avait intenté sur le port de Buxière, en exigeant un péage pour toute personne traversant d’une rive à l’autre. Et il affirma aux moines que tout et chacun, homme ou femme a le droit de traverser par Buxière de rive en rive avec de la marchandise ou tout autre chose en dehors de tout droit qui pourrait leur être réclamé.

La générosité envers le monastère commence à faiblir. Après avoir donné l’alleu comprenant chapelle,, port, écluse, moulin, terre, ferme, serf et la reserve de poissons et ceux qui passent d’une rive à l’autre, Acharie se resaissit et exige de toucher le péage du pour tous ceux qui passeront par Buxière et qui emprunteront le bateau pour traverser la Vienne en ce lieu.

Les moines veillent à leurs intérêts comme nous le raconte la charte suivante

1120 Charte 434

Acharie donne la dime de Nancré en présence de Gilbert, archevêque de Tours.

« Nous pensons qu’il est digne et sage de garder en mémoire pour l’éternité, par ces manuscrits quand la sage prudence des hommes se penche sur les dons des biens matériels. Que tous, et tous ceux qui viendront après nous sachent qu’Acharie et son fils Bouchard, un très grand ami de l’Abbaye vint un jour en notre chapitre en présence de l’abbé Gaudin, et sous le conseil de l’archevêque de Tours Gilbert qui était venu bénir l’abbaye.
Acharie donna la dime de Nancré qu’il avait appris posséder injustement, comme le lui avaient conseillé les magistrats ecclésiastiques et il confirma le don en le déposant sur l’autel, se plaçant son fils et lui derrière l’autel.

Cela s’est fait en la présence de Gilbert archevêque et de Hugues de Ste Maure, Geoffroy, Peloquin et son fils . Aimeric l’ancien de la Faye donna son accord de qui il tenait le fief ainsi que son fils Aimeric le jeune et sa femme Lisabeth surnommée Rumpestachia. ».

Acharie meurt dans les années qui suivent. Son fils Geoffroy en 1124 remet en cause tous ces dons et d’autres : à Noyers, Antogny, Sauvage, Ports de Piles. Finalement, les moines ont gain de cause.

Mais en 1144 soit 33 ans après ces donations, Bouchard petit fils d’Acharie, ainsi qua sa femme Lise et leur fille Scholastique confirment le don aux moines de la moitié du bourg de Buxière, le cimetière, la vigne, la moitié de l’écluse, le moulin et tout ce qui relève de l’obédience de Buxière. En échange de quoi il reçoit par charité 8 livres.

Ce cartulaire nous révèle d’autres aspects de la vie au XIIe siècle. Il ne s’agit plus de dons de terre mais d’homme

1147 Charte 557

Geoffroy seigneur de Marmande cède aux moines un serf du nom de Girald Lory.

« Dans cette présente charte, nous notifions à tous les hommes que Geoffroy, seigneur de Marmande, a affirmé que Girald Lory était son serf et son homme de peine à cause de sa mère Elisabeth Lory qui était la fille d’un certain David de Do né d’une prostituée.

Mais comme Girald appartient à l’abbaye de Noyers et aux moines, l’abbé Bernier et Geoffroy de Marmande se réunirent en un plaid à son sujet à la fontaine de Nancré, et là, le seigneur Geoffroy quoiqu’il n’eut aucun droit sur Girald, le donna à Dieu, à Marie et à l’abbé et affirma qu’il n’aura plus aucun droit sur Girald et qu’il ne lui demandera plus rien. Il proclama que Girald Lory, ses fils et ses filles étaient libres à partir de ce jour de tout grief envers lui, et en charité, il eut 25 sous et Bouchard son fils qui affirma aussi cela, 12 deniers. »

1176 Charte 601

Les moines de Noyers achètent quelques biens à Grizay.

« …Nous sommes allés chez un certain Guittet des Peux et chez ses fils Guillaume, André, Tiber, Jean. Il y avait là aussi Guillaume Meverius et sa sœur Alaîs qui possèdent tous la terre de Grizay jusqu’au niveau de la septième gerbée qu’ils ramassent pour le cens, avec la certitude pour le seigneur de n’être point trompé puisqu’ils ont prêté serment.

Ils possèdent aussi les prés voisins. Ils rendent la coutume pour cela à un militaire un certain Achard Engemant, un setier d’orge évidemment selon la mesure de Noyers, deux chapons, deux pains, un denier et un agneau à Pâques, ou à la place de l’agneau 7 deniers et une fois tous les 3 ans, une corvée.
Les susnommés tiennent ces coutumes d’Achard, mais Achard les tient de Guillaume Gorron et Guillaume Gorron du seigneur de Marmande lui faisant pour cela le service defini, en lui donnant 4 sous de monnaie angevine et pas davantage. Or ce service il le devra au seigneur de Marmande soit la rançon pour libérer son propre corps prisonnier, soit l’aide pour le mariage de sa fille, soit pour l’entrée de son fils dans la chevalerie, quand il l’aura demandé pour ces cas de nécessité…
Comme cela est écrit Achard a cédé la terre et le pré à l’abbaye avec les coutumes précitées et les 4 sous de service comme nous l’avions parlé plus haut au cas ou le seigneur de Marmande viendrait à les requérir d’ Achard pour l’une ou l’autre des nécessités que nous avons déjà énumérés, et ceux ci tiendront lieu de tout service, et nous ne devrons aucun service de plus à qui que ce soit pour quelque nécessité qui pourrait arriver…

 

Bouchard seigneur de Marmande et Lyse sa femme donnèrent leur accord, ils eurent lui 100 sous, elle 20 et leur fils Guillaume 3 sous, leur fille Marie 2 sous.

Témoins etc… »

Ce texte révèle quelques aspects de la vassalité au XIIe siècle. Le seigneur exige un impôt, une aide. Ici aide à payer la rançon, pour la dot de la fille ou l’entrée en chevalerie du fils. Les moines en achetant les terres les reprennent à leur compte, mais « pas plus qu’il ne faut »

Le cartulaire s’arrête peu après.

De l’abbaye de Noyers, il ne reste qu’un porche du XVIIe . Tous les bâtiments médiévaux ont été détruits. En plantant des arbres les propriétaires ont trouvé un dallage, comme celui d’une église, mais que faire ?

L’alleu de Buxière est actuellement un hameau. La chapelle existe toujours, propriété privée. Le port a été détruit il y a peu, on y voyait encore les points d’attache des bateaux qui faisaient la traversée. Le lieu dit Les Trois moulins de l’autre côté de la Vienne existe toujours. Deux moulins subsistent encore en activité au XIXe.

Grizay existe toujours. La maison avec son souterrain lieu du drame de 1074 aurait été située sur le côteau.

L’église de Nancré sur laquelle le seigneur de Marmande percevait la dime sans en avoir le droit a disparu.

Le château de Faye la Vineuse a été démantelé par Richelieu. Il n’en reste rien.
De celui de l’Ile Bouchard il ne reste rien non plus.

A Nouâtre subsiste un pan de courtine et deux tours en bord de Vienne. Propriété privée.

A Sainte Maure, peu de reste de la forteresse médiévale du XIe, qui a servi d’assise à un nouveau château construit à partir du XIVe

A Châtellerault, le château de Boson a disparu également.
Finalement les ruines de Marmande sont les seules survivantes de ce passé tumultueux de fiefs en guerre, d’abbaye soucieuse de son emprise terrestre, de crainte divine et d’appât du gain.